La mise en place de caméras de surveillance alimentées par l’intelligence artificielle (IA) pour les Jeux olympiques 2024 de Paris a été votée par l’Assemblée nationale jeudi, deux mois après un premier feu vert du Sénat.
Le gouvernement souhaite expérimenter à grande échelle l’installation de caméras assistées en temps réel par des algorithmes afin de repérer les comportements suspects, y compris les bagages abandonnés et les mouvements de foule inquiétants en vue des événements sportifs de grande ampleur de l’année prochaine.
Dans un hémicycle clairsemé, les députés français ont approuvé cet article controversé du projet de loi JO 2024, après plus de sept heures de débats houleux. Le texte peut encore être contesté devant le Conseil constitutionnel.
Front antisurveillance
Il y a une semaine, une quarantaine de parlementaires européens — principalement issus de la gauche — avaient demandé à leurs homologues français de voter contre le texte. “La France créerait un précédent de surveillance d’un type jamais vu en Europe, sous le prétexte des Jeux olympiques”, avertissaient-ils dans une lettre.
Au cours des derniers mois, le projet a fait l’objet d’une vive opposition de la part d’ONG de défense des libertés, dont La Quadrature du Net, ainsi que de groupes internationaux tels qu’Amnesty International et Access Now. Outre les préoccupations relatives à la protection de la vie privée, elles ont évoqué un conflit potentiel avec la législation européenne sur l’intelligence artificielle, actuellement débattue à Bruxelles.
L’exécutif affirme que les caméras de surveillance algorithmiques sont nécessaires pour assurer la sécurité des millions de touristes attendus à Paris l’année prochaine. Au cours des débats mercredi soir, des députés de la majorité ont soutenu que les caméras dotées d’IA auraient permis de repérer le camion de l’attentat terroriste de Nice en 2016 avant qu’il ne fonce dans la foule. Ils ont également déclaré que cela aurait pu permettre d’éviter le fiasco de la sécurité lors de la finale de la Ligue des champions, l’été dernier.
L’opposition de gauche a répliqué que cette surveillance de masse par l’IA était sans précédent dans les sociétés démocratiques et menaçait dangereusement les libertés civiles. Ils craignent également que les mesures, pour l’instant expérimentales, ne deviennent permanentes. Le précédent des JO 2008 à Pékin démontre, selon eux, que les Jeux ont déjà été utilisés pour tester des dispositifs de sécurité invasifs qui n’ont jamais été désinstallés depuis.
Dans un pays davantage préoccupé par la réforme des retraites, la Nupes n’a pas réussi à rassembler suffisamment de soutien contre le texte, ni à réveiller l’intérêt sur ce sujet. L’article a été adopté par 59 voix contre 14.